23 janvier 2012 1 23 /01 /janvier /2012 17:41

casque.jpgEcoutez la chanson sur Youtube

 

 

Jean Ferrat (1930-2010) était un chanteur et poète français.

À la fois chanteur engagé et poète, il était aussi compositeur, et mit notamment en musique de nombreux poèmes de Louis Aragon.

Jean Ferrat était voisin des idées communistes. Cependant, il resta critique vis-à-vis des positions du parti communiste sur l'URSS.

Bien que peu présent dans les médias et malgré un retrait de la scène à 42 ans, il connaît un grand succès, fondé tant sur la qualité de ses compositions que sur ses prises de positions sociales et politiques.

 

 

ferrat.jpg

 

 

Nuit et Brouillard est une chanson sortie en décembre 1963 sur l'album éponyme chez Barclay. Jean Ferrat en est l'auteur-compositeur et l'interprète.

 

Le titre fait référence à la directive Nuit et brouillard (en allemand : Nacht und Nebel) signée en 1941 par Adolf Hitler, qui ordonne que les personnes représentant une menace pour le Reich ou l'armée allemande soient déportées en Allemagne pour être exterminées dans le secret absolu.

 

L'expression "Nuit et brouillard" fut d'abord employée par Alain Resnais en 1955 qui a intitulé ainsi que un film sur la déportation.

En 1963, tandis que les radios passent en boucle les morceaux de rock-yéyé, Jean Ferrat propose une chanson engagée sur l'horreur de la déportation et invoque le devoir de mémoire. La chanson fut interdite à la radio et à la télévision.

Pour autant, pour cette chanson Jean Ferrat recevra le grand prix du disque de l'Académie Charles-Cros en 1963. Ce sera le début du succès pour le chanteur.

 

Commémorant les victimes des camps d'extermination nazis de la Seconde Guerre mondiale, Nuit et brouillard évoque également pour Jean Ferrat un drame personnel et douloureux : la disparition de son père, juif émigré de Russie, arrêté puis séquestré au camp de Drancy par les autorités françaises, avant d'être déporté (le 30 septembre 1942) à Auschwitz où il est mort.

 

 

Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés
Qui déchiraient la nuit de leurs ongles battants
Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent

Ils se croyaient des hommes, n’étaient plus que des nombres
Depuis longtemps leurs dés avaient été jetés
Dès que la main retombe il ne reste qu’une ombre
Ils ne devaient jamais plus revoir un été

La fuite monotone et sans hâte du temps
Survivre encore un jour, une heure, obstinément
Combien de tours de roues, d’arrêts et de départs
Qui n’en finissent pas de distiller l’espoir

Ils s’appelaient Jean-Pierre, Natacha ou Samuel
Certains priaient Jésus, Jéhovah ou Vichnou
D’autres ne priaient pas, mais qu’importe le ciel
Ils voulaient simplement ne plus vivre à genoux

Ils n’arrivaient pas tous à la fin du voyage
Ceux qui sont revenus peuvent-ils être heureux
Ils essaient d’oublier, étonnés qu’à leur âge
Les veines de leurs bras soient devenues si bleues

Les Allemands guettaient du haut des miradors
La lune se taisait comme vous vous taisiez
En regardant au loin, en regardant dehors
Votre chair était tendre à leurs chiens policiers

On me dit à présent que ces mots n’ont plus cours
Qu’il vaut mieux ne chanter que des chansons d’amour
Que le sang sèche vite en entrant dans l’histoire
Et qu’il ne sert à rien de prendre une guitare

Mais qui donc est de taille à pouvoir m’arrêter?
L’ombre s’est faite humaine, aujourd’hui c’est l’été
Je twisterais les mots s’il fallait les twister
Pour qu’un jour les enfants sachent qui vous étiez

Vous étiez vingt et cent, vous étiez des milliers
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés
Qui déchiriez la nuit de vos ongles battants
Vous étiez des milliers, vous étiez vingt et cent

 

 

 

Analyse de la chanson

Le texte fait référence à la Shoah : « wagons plombés », « nombres ». Les déportés subissent une déshumanisation, la perte de leur identité.

Dans les vers 6 et 7, l'image développée exprime la fatalité. Il y a un parallélisme : la main (Allemands) jette les dés et fixe le destin inéluctable des déportés.

Aux vers 13 et 14 : « Jean-Pierre » : prénom français, catholique, qui fait référence à « Jésus » au vers suivant. « Natacha » : prénom slave, tsigane, qui fait référence aux persécutés. « Samuel » est d'origine juive. A l'époque de l'écriture de la chanson, Jéhovah est une branche de la religion juive. Vishnou est le dieu protecteur indou (avec une trompe d'éléphant). Ainsi tout le monde est concerné (il y avait très peu d'indiens dans les camps).

La première strophe revient comme un refrain à la fin mais avec un changement grammatical : le poème est cyclique : la première strophe correspond à la dernière. « Ils » (point de vus omniscient) devient « vous » (l'auteur s'adresse aux morts) : désir de rendre hommage. «Vous» : l'auteur s'adresse en fait à tout le monde.

Le vers 25 ("On me dit à présent que ces mots n'ont plus cours") marque un tournant dans le poème. En effet, il y a un changement au niveau de la temporalité : après avoir raconté, Ferrat prend la parole, ce qui témoigne de l'aspect engagé du poète. « On » : la morale populaire.

 

Des strophes 1 à 6, le chanteur interprète de manière posée, lente : récit narratif, description de la vie dans les camps. On ressent par contre son engagement dans les strophes 7 à 9 : voix tremblante, auteur saisi par les émotions. La voix se fait de plus en plus forte : aspect sensible du texte.

Jean Ferrat souhaite accomplir le devoir de mémoire : « pour qu'un jour les enfants sachent qui vous étiez » et répondre aux négationnistes : « on me dit », « il vaut mieux », en combattant la censure : « Mais qui donc est de taille à pouvoir m'arrêter ? ». En effet, à sa première sortie, cette chanson a été censurée. Le chanteur veut partager la vérité, informer, rendre hommage aux survivants, instruire les enfants, et soutenir tous ceux qui ont souffert. Il veut également introduire les chansons engagées dans la Chanson française.

 

 

Forme

Tous les vers sont en alexandrins, forme noble traditionnelle. Il y a 9 strophes de 4 vers ; les rimes sont variées : embrassées, suivies ou croisées sans rigueur. Les vers en majorité possèdent une césure à l'hémistiche (rythme binaire) qui est soulignée par l'auteur dans sa manière de chanter.

 

 

Accompagnement musical et voix

Les timbales représentent la musique des exécutions, le glas qui résonne, ou le roulement du train : aspect solennel. Puis entre en strophe 2 la guitare : côté plus sensible. On a au fur et à mesure une amplification : les instruments s'ajoutent (timbales, guitare, vents, violons, etc...). L'accompagnement suit la voix du poète.

La voix du poète est chaude, chaleureuse, profonde, posée, grave. Il roule les 'r'. La dernière syllabe à la fin d'une strophe est allongée, elle dure : « été », « genoux », « policiers », « étiez »... : supplice qui dure (strophes 1 à 6), perpétuer le souvenir (strophes 7 à 9).

 

Sources :

Wikipedia.fr

lire-c-delivrant.eklablog.fr

 

 

 

Vous voulez en savoir plus ?

Biographie de Jean Ferrat sur Wikipedia

 

 

 

 

commentaires

C
très bien cette musique elle m' a beaucoup aidé pour un devoir maison. =)
Répondre
A
Cette chanson a été choisi par Mr le Maire lors de la cérémonie aux monuments aux morts dans notre village d'Alsace (Oberhaslach) ce 8 Mai 2015 <br /> Après avoir été censurée au début (ORTF)nous pouvons nous réjouir qu'elle ne soit plus oubliée , elle nous rappelle qu'il faut rester vigilent tout le temps <br /> (
Répondre
L
merci de votre aide
Répondre
D
Merci pour cette belle chanson.<br /> Je l'aime vraiment bien, elle est magnifique.<br /> Jean Ferrat sera certainement content, car cette chanson est magnifique tout simplement.<br /> Merci à vous.<br /> Dominique Sek
Répondre
D
Très pratique ! J'avais choisie cette œuvre pour l'histoire des arts. Et ce site m'a beaucoup aidé. Merci encore !
Répondre
S
Moi aussi je m'en sers pour l'HDA et se site ma beaucoup aider pour le description
A
Cette page est géniale ! Je dois faire un dossier sur cette chanson et tout est dit ! Comment ne pas faire de copier coller avec ça ! Franchement bravo !!
Répondre